Revenant de Crozet, Patrick Vauzelle, capitaine du Saint-Jean, affrété par les
Armements Réunionnais, où l'on retrouve la Sapmer et l'Armement des
Mascareignes, nous avait signalé la présence dans les zones économiques
exclusives françaises du Grand Sud, et notamment dans la ZEE des Kerguelen, de
nombreux palangriers pirates. L'Albatros, patrouilleur de la Marine nationale
affecté à la surveillance des Terres australes et antarctiques françaises, vient
d'en apporter la confirmation avec l'arraisonnement coup sur coup de deux
pillards chiliens.
Le 1er septembre, alors que l'Albatros patrouille dans la ZEE des Kerguelen, il
surprend l'Ercilla et l'Antonio Lorenzo, deux palangriers battant pavillon
chilien, en pleine action de pêche dans le même secteur. Joli coup, dans la
mesure où l'Albatros n'est pas équipé d'un hélicoptère embarqué ce qui rend
difficile la constatation d'un flagrant délit indispensable en la circonstance.
L'Ercilla est un bateau de pêche de 297 tonnes appartenant à la société Pesquera
de los Andes. Il est armé par 34 marins sous les ordres d'un capitaine chilien.
L'Antonio Lorenzo, lui, jauge 500 tonnes et est armé par Pesquera Concar Andes.
A bord, 37 marins et là aussi un capitaine chilien. Les deux armements sont
"domiciliés" à Punta-Arenas à l'extrême Sud du Chili.
Escortés par l'Albatros, les deux palangriers pirates ont mis le cap sur la
Réunion où ils sont attendus la semaine prochaine.
Comme dans le cas du Golden Eagle, dernier en date des palangriers pirates
arraisonnés, l'Ercilla et l'Antonio Lorenzo avaient fait l'escale à Maurice
avant de rejoindre leurs lieux de pêche. Port-Louis s'affiche désormais
ouvertement comme la base arrière des pirates du Grand Sud. Selon des sources
concordantes, des quantités impressionnantes de légines, illégalement pêchées,
transitent actuellement par le port mauricien.
Vendredi de la semaine dernière, le tribunal correctionnel de Saint-Denis a
examiné l'affaire du Golden Eagle. Surpris le 21 juin dernier par l'hélicoptère
Panther de la frégate de surveillance Floréal dans la ZEE des Kerguelen, il est
ramené le 7 juillet à la Pointe-des-Galets. Dans ses cales, une vingtaine de
tonnes de légines. Comme pour les deux bateaux chiliens, la dernière escale
portée sur le livre de bord est l'île Maurice. A l'encontre du capitaine danois
Jogvan Vilhelm, le procureur de la République a requis un million de francs
d'amende, la confiscation du bateau et du produit de la pêche. Le délibéré sera
rendu le 18 septembre prochain.
Alain Dupuis
__________________
Contactée mercredi de la semaine
dernière, Brigitte Girardin, administrateur supérieur des Terres australes et
antarctiques françaises, nous avait indiqué que les arrêtés fixant "les
nouvelles règles du jeu" dans les zones économiques exclusives des TAAF seraient
signés avant le 10 septembre, date du départ prévu du premier bateau pour une
campagne dans le Grand Sud.
Les arrêtés ont été signés le 4 septembre, vendredi de la semaine dernière.
A Paris, l'administration des TAAF se refuse pour l'instant à en livrer le
contenu dans la mesure où l'information n'est pas officielle.
Ces documents fixent plusieurs points. D'abord, la quantité maximale de poissons
autorisés à être pêchée suivant les recommandations du professeur Duhamel du
Muséum d'histoire naturelle de Paris.
Pour la saison de pêche 97 - 98, elle avait été fixée à
4 700 tonnes dont 1 800 tonnes, 1 200 tonnes à la palangre et 600 au chalut,
pour les Armements Réunionnais regroupant la Sapmer et l'Armement des
Mascareignes, 1 900 tonnes au chalut pour la Comata et 1 000 tonnes pour deux
palangriers ukrainiens. La nouvelle saison qui s'annonce verra l'arrivée dans le
Grand Sud français de l'armement le Garrec, basé à Boulogne-sur-Mer qui devrait
obtenir un quota de 1 200 tonnes aux Kerguelen. Un nouveau venu qui fait grincer
des dents les armements locaux, notamment les Armements Réunionnais, qui
pourraient faire jouer l'argument juridique de l'antériorité.
Autre nouveauté, l'application, sans doute à hauteur de 2,50 F par kilo, d'une
redevance de pêche aux armements français. Contrairement aux Ukrainiens qui
paient cette redevance avant le début de la campagne et sur la totalité du quota
attribué qu'il soit ou non pêché, les armements français paieront en fin de
campagne et uniquement sur la quantité réellement pêchée.